Penser les donnees : des architectes du big data (Le travail des precisions 2/3)

« Data scientists », « Data architects » voire « Data alchemists »

Grandes seront les professions qui participent a la conception et a l’analyse des architectures de donnees. Derriere ces intitules se trouvent des individus dont nos choix contribuent a faconner la figure des prestations connectes. Prendre en compte la dimension sociale d’la fabrique des donnees permet de se apporter les moyens de questionner a Notre fois un forme, et les usages qui en paraissent faits.

Loin d’etre le reflet neutre et objectif une realite, les donnees paraissent le resultat de processus complexes de captation, de cadrage et d’enregistrement d’elements plusieurs sous des formes standardisees et quantifiables. Ces operations impliquent toujours des choix (de variables a prendre en compte, d’echelles sur lesquelles nos quantifier, de seuils, de hierarchisation…) qui conditionnent la forme finale des donnees et, de votre fait, celle des calculs qui pourront etre realises a partir d’elles – ce dont nous parlions au premier post de cette collection.

Ainsi, comme l’explique le sociologue Jerome Denis dans le ouvrage la ti?che invisible des precisions, « les precisions ne semblent jamais desincarnees et n’existent pas a l’etat ‘pur’. Elles paraissent forcement affaire de melanges, de bricolages, d’accommodements, d’agencements hybrides. Elles seront l’objet et le service d’un boulot ». Les tri impliques via votre article seront faits – consciemment ou non – avec de multiples acteurs, ainsi, en particulier par des specialistes et professionnelles dont le faconnage des donnees constitue le c?ur de metier. Ils et elles concoivent la forme que prendront les informations et nos bases dans lesquelles elles sont reunies en fonction des objectifs qui un paraissent assignes, avant que des petites mains, nombre moins visibles (et dont nous parlons dans le billet suivant de cette collection) se chargent d’une construction effective des donnees.

Pouvoir des choix de structuration des informations : l’exemple des genres musicaux sur Spotify

La facon dont les precisions seront construites impacte reellement largement les utilisations qui peuvent en etre faites par des outils (en particulier algorithmiques) qui les traiteront ensuite. Mes objets informationnels que sont des donnees sont des representations schematiques, qui grossissent l’importance de certaines variables et en laissent beaucoup de autres de cote ; ils contribuent ainsi a la structuration de systemes de representation bien particuliers.

Le processus de categorisation des musiques sur Spotify permettra d’illustrer votre dynamique. Si l’histoire en classification musicale par genre reste bien sur ancienne, ainsi, en partie reprise par la plateforme qui n’oublie nullement totalement le « rock » ou le « jazz », celle-ci se targue egalement d’effectuer emerger les « genres musicaux de demain ». L’importance du catalogue musical de Spotify (environ 50 millions de titres) lui permet Effectivement de conduire des analyses statistiques sur son fond et coder, sur la base de plusieurs partis-pris, des labellisation inedites.

La selection de variables particulieres Afin de decrire des titres du fond musical d’la plateforme oriente ces nouvelles categorisations. Celui-ci inclut de facon notable diverses caracteristiques liees a des etats emotionnels, egalement appelees « attributs psychoacoustiques », comme l’energie, la « dancabilite », la « couleur emotionnelle ». Une telle labellisation conduit Spotify a construire un referentiel musical base davantage sur les effets sensoriels supposes des titres que sur leurs caracteristiques structurelles. J’ai plateforme suit en i§a le parti-pris d’une start-up d’ « intelligence musicale » EchoNest, dont celle-ci a fait l’acquisition en 2014, qui affirmait a l’epoque vouloir developper une categorisation dynamique des musiques en fonction des mots « couramment utilises Afin de les decrire », car « chercher du ‘rock’ [serait] tout juste plus efficace que de reclamer a ecouter des ‘chansons qui sont de la musique’ ».

Ainsi, Spotify voit aujourd’hui cohabiter deux types de categorisation musicale, intrinsequement lies a toutes les criteres employes Afin de les qualifier : l’un correspond a toutes les genres « traditionnels » de musique et reste base dans leurs caracteristiques structurelles (type de rythme, tempo…), l’autre est oriente vers des etats emotionnels ou des activites bien precis supposement lies a un ecoute. C’est ce qui apparait sur la capture d’ecran suivante de la page « decouverte » de l’interface de Spotify, voyant se melanger d’un cote le hip-hop, le rock et l’electro, et de l’autre la musique « chill », sport ou encore estivale.

Ce glissement par une typologisation emotionnelle en musique peut etre compris, suivant l’analyse des auteurs et autrices de Spotify Teardown (premiere etude de grande ampleur menee dans le fonctionnement de la plateforme), comme s’inscrivant au sein d’ « votre mouvement de grande ampleur vers une approche utilitariste d’la musique, dans laquelle la musique est De surcroit qui plus est consommee en lien avec 1 contexte particulier ou en appui de certaines activites (plutot que au cadre d’une experience esthetique ou d’un travail de construction identitaire, notamment) ».

C’est en tout cas revelateur de l’importance des choix realises avec des « architectes des donnees » une plateforme dans la construction une realite qui prend forme sur le interface. La decision, contraire a toutes les standards classiques de musicologie, d’inclure des variables emotionnelles site de rencontre gratuit pour les introvertis dans la categorisation musicale, s’accompagne d’une bascule dans la facon dont l’ecoute musicale est envisagee. Si on choisissait certainement deja au temps des cassettes audio d’ecouter des titres divers en fonction du moment une journee et de ses occupations, la generalisation avec Spotify des playlists orientees par des contextes et des humeurs particulieres (« a ecouter a domicile », « motivation concernant le sport », « matin »…) normalise ces categories, et oriente de votre fait a grande echelle les pratiques d’ecoute des utilisateurs et utilisatrices. Notre forme des precisions, pensee via leurs concepteurs et conceptrices, conditionne leurs usages.

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